Interview radio de Jean-François Spricigo à l’occasion de l’exposition notturno au Botanique (Bruxelles).
Diffusée le 7 juin 2007 dans l’émission Au Fil de l’Art de Radio Judaïca.
Durée : 17min 55sec
Tag Archives: radio
silenzio
• 2009.10.19 – 2009.10.25 Bibliothèque d’Østerbro (Ambassade de Belgique à Copenhague, Danemark)
• 2008.01.11 – 2008.02.28 Excellence (Bruxelles)
• 2007.04.21 – 2007.06.25 Cultuurcentrum (Hasselt, Belgique)
• 2006.04.22 – 2006.05.15 Centre Wallonie Bruxelles (Paris)
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• 2005.09.21 – 2005.11.06 Contretype (Bruxelles)
Un Visionnaire intempestif et libre
par Marcel Moreau
J’aime beaucoup ce qu’il fait, je veux dire ce qu’il défait. Son savoir-défaire fait mieux que bien des accomplissements.
Il est facile d’être un faiseur. Il suffit de donner du paraître, toujours plus de paraître, à la florissante entreprise des faillites de l’être. L’ « air du temps » est propice aux faiseurs. Le temps des faiseurs s’emploie à accoutumer le regard – l’esprit aussi – à la séduction vénale des mirages de société. Il le conditionne à la berlue, en tant que valeur marchande. Au fond, quand on y songe, rien de plus proche de la prostitution qu’un regard, en cette époque où le spectaculaire décide, en maître, du destin des hommes et des choses. À l’immense devanture des images, les apparences offrent leurs charmes au regard. Le regard ne met pas longtemps à acheter son plaisir de regarder. Les profondeurs peuvent aller « se rhabiller ». Nue, leur vérité décourage la crédulité, jugule le vice, nous rappelle que la connaissance n’est pas fille facile, dont on jouirait à la sauvette. Elle n’est donc pas de mise.
À une époque où, hélas, la frivolité flatte et règne, l’œuvre de Jean-François Spricigo fait, face à cette frivolité, figure d’hérésie ô combien nécessaire.
Le photographe de toute évidence n’est pas de la religion des montreurs d’appas. Montrer, ce n’est pas assez pour lui. Montrer les appas, c’est trop. Il ne s’agit pas, dans son cas, de nier le visible, mais de le renvoyer à ses soubassements, ses ratés, ses tares, ses failles, ses brouillons, pour les aimer, les faire aimer. Il sait plus que tout autre que s’il y a de la beauté dans ce monde, ses origines sont convulsives, quelquefois misérables : un effort insensé des ténèbres, ou de la boue, pour se poser en architectes. Jean-François retourne aux origines, à l’informe matrice, non pour l’enjoliver : en vue d’en relégitimer les bases chancelantes, friables, rebelles à l’esthétisation à tout prix, comme dogme, mode, source d’illusion, de facticité, donc de profit.
En pénétrant cette œuvre, en m’attachant à elle par ses alluvions, je me sens confirmé dans une de mes rares certitudes : l’ostentation nous ment, elle n’existe que pour plastronner, debout dans sa perversité, voire sa cupidité.
Il y a bien des années, j’écrivis ceci : « Vivre, pour moi c’est battre de vitesse ma décomposition. »
Surgir le premier, soit par un art, soit par toute autre forme de dépassement de soi, y compris, évidemment, en amour, sur cette ligne d’arrivée imaginaire qui sépare le passionnel du putrescible et le putrescible de l’anéantissant, c’était ce que j’appelais alors vivre. À ce jeu, je ne gagnais qu’accès d’ivresse, fulgurances d’orgasmes, mais je les gagnais contre l’extrême conscience que j’avais de mes progrès en dégradation. Pour vivre, le photographe n’a pas besoin de se jeter sur la ligne d’arrivée. C’est au départ, dans son œil du dedans, que se produit l’événement. Ici, point de compétition entre le périssable et l’au-delà du périssable. Sous l’œil du dedans, le périssable, intime et universel, en devient un mouvement créatif, fondateur, comme vital, une décomposition surmontée d’un vouloir. Une œuvre naît, ne cesse de naître, qui pousse la cruelle lucidité au paradoxe d’être en même temps une délivrance. L’œil du dedans se retourne dans ses frontières cavitaires, les recule. Il ratisse large dans les anfractuosités du visible. Il nous libère de notre dépendance envers l’insigne superficialité des petits arrangements – traditionnels – avec la réalité des gouffres. Avec lui, ce qui se meurt en nous n’est plus tout à fait d’un délabrement indigne d’une vivacité. Ce qui se meurt en nous, c’est ce qui se meurt aussi concomitamment dans nos civilisations de l’avoir, au détriment de l’être. La différence, c’est que l’œil du dedans voit plus loin et plus fort que ne le peuvent ou que ne le veulent les accélérations aveugles de l’histoire.
Le rythme de Spricigo n’est pas le mien, manifestement. Mais c’est comme si, généalogiquement, ils se rejoignaient, sur une même ligne, ni de départ ni d’arrivée ni tout à fait d’ailleurs, là se donnent mystérieusement rendez-vous l’exigence de vérité de l’un et celle de l’autre.
J’ajouterai à cela, tout simplement, mon plaisir d’avoir découvert un authentique artiste.
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Publication
2005
• « silenzio », livre de photographies
Éditions Yellow Now – ISBN 2-87340-198-2
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Presse papier
2005
• 11.01 Exporevue
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• 04.15 Le Vif L’Express
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Presse radio
2006
• 04.06 France Culture – Double Culture
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Presse TV
2005
• 12.07 TV5 Monde – Hep Taxi !
• 11.27 No Télé – Info HO
• 10.21 RTBF La Une – Hep Taxi !
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